mercredi 28 novembre 2007

Chapitre 3

Quand Tony Witches, le fils du célèbre milliardaire fuit avec son garde du corps pour découvrir les joies de l’arrière pays. Ha non, j’oubliais, j’étais un otage. Aux dernières nouvelles, on demandait une rançon de 5 millions de dollars. Monsieur Thomas Witches président des sociétés de sécurité du même nom se refusait à tout commentaire. Je ne comprenais rien. Pourquoi n’avait-il pas mis fin à ses rumeurs sans aucun fondement. J’ai appelé mon père une fois. Il m’a dit de rentrer. Je lui ai dit que j’étais avec Lolita de mon plein gré et qu’il devait faire taire ce ragot. Il a soupiré, a dit qu’il n’y était pour rien, mais qu’il ne dirait rien pour y mettre fin. Je l’ai engueulé comme jamais. Il m’a dit qu’il préférait qu’on me considère comme une victime que comme un coupable et que je devais penser à l’image de la famille face aux médias.

Je lui ai raccroché au nez. Jamais je n’aurais cru ça de lui. Quand je l’ai dit à Lolita, elle s’est contentée de me répéter que je ferais mieux de l’écouter et de rentrer. Jamais de la vie que je lui ai dis.

A ton aise qu’elle a répondu puis, elle a dit : c’est pas plus mal, grâce à ça, on passe inaperçu. C’est que tu ne ressembles pas beaucoup à l‘idée qu’on se fait d’un otage.

Je me suis frotté les joues. Lolita voulait que je garde une barbe de quelques jours. Tony Witches était toujours impeccable, il suffirait qu’il le soit un tout petit peu moins pour que personne ne le reconnaisse avait-elle dit

Oui, ben si je suis toujours impeccable c’est que je ne supporte pas être négligé et la barbe, ca gratte. J’avais l’air d’un clodo. Lolita aussi avait changé de look mais elle était toujours aussi belle. Plus même.

« Pile » s’exclame Lolita.

J’envoie la pièce. Elle roule sur la table, un poing s’abat dessus. Se soulève.

« Encore gagnée. Tu vois, dans la vie, pour réussir, il ne faut pas rester en attente. Il faut saisir sa chance sans attendre qu’elle vienne à toi sinon tu restes comme ces ploucs qui se plaignent de leur sort. Ton père l’avait compris. C’est un battant. Un peu magouilleur sur les bords mais au fond, nous en sommes tous là ».

Oui ben si la chance était vraiment avec nous, nous ne serions pas en train de déjeuner dans un bar d’une station service de village. Si nous avions de la chance, je n’aurais pas trouvé un cafard crevé dans mon sandwich.

Face. « Merde, encore perdu ». Si j’avais de la chance, je jouerai au golf, pas à pile ou face.

« Allez, statistiquement parlant, j’ai une chance sur deux. J’ai perdu quatre fois et toi tu as gagné quatre fois. Donc, je devrais gagner la prochaine et toi la perdre.

- Ce n’est pas comme ça que ça marche, je t’ai déjà expliqué, t’es bouché ou quoi ».

Je le savais bien. Tout le monde le savait. Une chance sur deux reste toujours une chance sur deux quoiqu’on ait gagné ou perdu avant.

Elle écrase la pièce. « Face » dit-elle. Elle lève la main. Encore gagné la salope.

« Je t’explique encore.

- Quoi ?

- La pièce !

- T’as une veine de cocu voilà tout. Quoique pour ça il te faudrait un mec.

- Houai, c’est ça le secret. Si tu as de la chance tu gagnes. Si tu n’en a pas tu perds. Après, il faut juste éviter de jouer avec quelqu’un qui maîtrise mieux la chance que toi. »

Elle aspire sur sa cigarette. Ca ressemble à un soupir. « Tu m’en files une » dis-je en montrant le paquet.

Elle le fait glisser vers elle. « Non, je suis encore ton garde du corps. J’ai pour mission de te protéger. Même contre ce poison.

- Grosse nouille tu n’as jamais entendu parler du tabagisme passif ? Tu m’empoisonnes même en fumant devant moi.

Elle écrase sa clope dans le cendrier. « T’as raison. J’arrête cette merde. »

Je reprends ma pièce. « Encore raté ».

Elle se lève. Me met la main sur l’épaule. Rien que ce léger contact me fait frissonner. Je l’adore.

« Allez, viens. On y va.

- Où ?

Je lui avais déjà demandé plusieurs fois depuis qu’on avait quitté l’auberge très mal nommée : « on est bien chez nous ». Ca peut vu le prix qu’elle avait sans doute payé pour que le gérant ferme sa gueule à notre sujet. Enfin, j’imagine. Elle ne m’a pas laissé prendre part à son marchandage. On était parti le lendemain matin. Bien trop tard à mon goût après un échange standard de ma décapotable contre son tas de merde et le gérant a quand même eu le culot de se plaindre comme quoi, elle devait être fichée et que ça lui ferait du boulot de la fourguer en pièce détachée.

Putain, et voilà qu’il pleuvait maintenant. Et cette voiture qui ne voulait pas s’ouvrir. La portière est coincée par la rouille. Voilà quand même, ça s’ouvre avec un grincement, à croire qu’elle va tomber en miette. On entre, on est trempé. Elle secoue la tête comme un chien qui s’ébroue. Elle m’envoie plein d’eau. Je gueule. Elle rit. J’aime la voir rire. Je démarre, mets le chauffage laissant le froid et la pluie dehors. Je reprends la route. J’ai la plus belle fille du monde à mes cotés. Elle est peut-être là la chance.

« Tu te décides à me dire où on va ?

- Non. »

Non. Elle n’est pas là ma chance

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